Je suis heureux douvrir ce septième Café de lEurope dans le cadre historique dune salle qui jouxte un véritable Café dont le Style Liberty rappelle les heures fastes où les personnalités que jimagine vêtus délégants costumes de lin et de robes à la dernière mode des cours dEurope, prolongent lheure du repas dans une atmosphère de discussions diplomatiques dont les grandes questions politiques ne troublent pas la nonchalance et la nostalgie des heures heureuses.
Une atmosphère où les conflits en cours ne bloquaient pas forcément les frontières aux voyageurs mystérieux, aux diplomates anxieux, aux dandys virevoltants, ou aux historiens épuisés par leurs recherches, tous venus chercher dans le Grand Hôtel des Thermes un repos et une cure pour écrire ensemble les épisodes dune histoire à la recherche dune paix retrouvée : celle du corps et celle des hommes.
Nous sommes donc réunis dans un Café et nous savons tous combien nous apprécions le café italien : court, parfumé, long en bouche. Mais dans cette salle qui réunit les organisateurs des sept autres Cafés de lEurope, nous pourrions aussi évoquer le café de Spa accompagné de spéculos, celui de Baden-Baden où le plaisir nest complet quen y ajoutant de la crème un peu épaisse, ou bien encore la liqueur café dOurense propice à la convivialité des heures tardives et très certainement le thé du milieu de laprès-midi qui nous attend à Bath, accompagné de quelques muffins. Et je noublie pas pour autant le café turc qui nous sera servi à Bursa à la fin de lannée prochaine.
Autant de « manières de table ». Autant de formes de convivialité propres à chacun des pays qui composent le kaléidoscope dEHTTA.
Mais nous nous retrouvons aujourdhui dans lidée dexaminer ensemble comment lhistoire de lEurope a construit nos villes, en a constitué la substance humaine et intellectuelle, parfois malgré elles et parfois contre elles quand lEurope était entraînée dans le tourbillon des conflits.
Ce rassemblement est riche par lui-même dune diversité dhistoires et de personnages, darchitectures et de lieux daccueil qui ont tissé lhistoire commune de lEurope, qui nous ont constitué comme des Européens, responsables dun héritage, dun patrimoine et dune culture.
Sengager à relire ensemble cette histoire et à en raconter les histoires comme si des personnages amis, juste un peu oubliés, revenaient nous visiter aujourdhui, constitue un défi et surtout un engagement de tous ceux qui tracent la route dun siècle à lautre, dun regard émerveillé à un autre.
Erik Orsena décrivait en peu de mots dans « Villes deaux » cette surprenante constance de latmosphère des villes thermales dont nous avons la charge et le devoir dassurer ensemble la continuité moderne : « Les villes deaux sont fécondes et alimentent tous les mythes et toutes les interprétations. A lheure des cocktails, quand on shabille pour les soirs, quon passe sur son visage les dernières couches de couleur, quand le crépuscule tombe, cest linstant des histoires chuchotées à mi-voix, des mystères contés dans la pénombre. Valery Larbaud dit lennui des jeunes filles immobiles, comme paralytiques de leurs propres émois. Milan Kundera y fait danser les dernières valses, celles de tous les adieux. Katherine Mansfield y reconnaît la longueur des jours et y mesure les règles dune société, lordre dune Allemagne. On se raconte les aventures de Rousseau à Enghien, quand une société de dames tenait salon au bord du lac, ou celle de Lamartine à Aix. »
Nous sommes un rassemblement et donc un espace de partage. Et cette histoire doit continuer grâce à nous !
Merci à tous dy contribuer ! |